
Samedi muy caliente aux airs d’été, je me dirige à Santa Cruz, question d’en profiter. Après une baignade sur fond de montagnes verdoyantes et maisons colorées qui contrastent avec le bleu du ciel, c’est l’heure de manger! Au menu : tapas canarios et cocktail. Je partage l’almuerzo avec les parents, ensemble, pas ensemble, sur la terrasse d’un resto typique d’une rue piétonnière pittoresque, avec une soundtrack d’espagnols festifs improvisés chanteurs, signe que le lunch s’est éternisé en bonne compagnie.
Le coeur un peu réchauffé d’Apérol et le ventre bien content de queso local, croquetas et dessert, j’ai envie de poursuivre cette petite célébration avec moi-même. Pit stop au Spar pour acheter quelques Estrella Galicia de route, à déguster où mes pieds me mèneront. Maintenant que le soleil a fait place aux nuages, je suis prise d’une impulsion d’aller à la plage. Mon corps me réclame le contact avec le sable volcanique, encore chaud de la journée.
Je traverse une petite plaza ombragée, avec un kiosque-bar extérieur, remplie de locaux qui se sont réunis pour l’apéro. Enfants qui jouent, couples en pleine discussion, éclairage on point, avec les petites fairy lights à travers les plantes grimpantes.

L’instant d’un moment, je me surprends à me dire que j’aimerais partager ce moment avec quelqu’un, être in love dans ce setup magique vu de l’extérieur. Pour être partie à l’aventure en couple plusieurs fois, je sais à quel point ces moments peuvent être précieux – malgré que ça soit 100% différent de voyager solo, mais ça c’est une conversation pour un autre jour.
Perdue dans mes pensées, j’arrive à la plage – pratiquement déserte, bière à la main, prête pour un me time en bonne et due forme. La vie avait d’autres plans pour moi, l’Univers m’avait entendu. Careful what you wish for they say.
À peine cinq minutes plus tard, je vois un (bel) étranger allongé sur la plage, en pleine contemplation du paysage, aussi en train de prendre petite bière et collation. Je lui souris discrètement. Il enlève ses écouteurs et me fait signe. Oops, ça m’apprendra.
Comme si c’était la chose la plus normale à faire, je m’approche et je m’assois avec lui. « Salud! What’s your name? » Vladimir d’Espagne, aux yeux verts, cheveux bouclés pâlis par le soleil et sourire bien blanc entreprend de m’offrir des frutos secos mojados – fruits secs mouillés (?!?) J’ai appris que c’était le résultat d’avoir essayé de les “désaler”.
Oui, il y a des idées qui paraissent bonnes sur papier, mais qui se traduisent assez mal dans la réalité, je déconseille fortement. C’est exactement ce que ça a l’air; mouillé et pâteux. Tout sauf le fun.
Les pieds dans le sable chaud, on échange quelques histoires divertissantes, mais décousues – conversation typique de deux étrangers qui ont pris un verre ou deux avant de se rencontrer. J’apprends qu’il est un peu hippie, habitant ici et là selon ses projets.
Tantôt thérapeute en massages, tantôt ébéniste, il est “habile de ses mains” qu’il m’annonce, sourire en coin bien assumé. À en croire ses explications, il manoeuvre le bois comme le corps avec une douceur et une attention franchement sexy à écouter, gestuelle à l’appui. Je sais pas s’il fait exprès ou il est juste espagnol, mais j’ai peut-être un peu chaud finalement. Talk suave to me, por favor.
À cheval entre discussions profondes et légères, on effleure la méditation ou le pouvoir de créer nos vies de rêve, en spanglish, avec corrections sur demande – porque quiero practicar, por supuesto. Je vois le temps filer et le jour nous quitter lentement, mais surement. Je me passe la réflexion que je devrais partir prendre mon bus (qui passe aux heures à ce stade-ci). L’idée d’un cours d’anatomie (c’t’une joke maman!) et d’un deuxième verre tombent dans l’oubli.
« Voy a verte de nuevo? Fue un buen momento. » qu’il me dit. Je me lève et commence à rassembler mes trucs sous son regard attentif et quelques compliments que je garde dans ma back pocket pour les jours où j’en aurai besoin. « Buenas noches à ti. »
Sandales en main, je marche pieds nus vers le terminus. Peut-être. On verra. Surement pas. Drôle de timing, je m’en vais dans deux jours.
Ironie du sort – même si je m’en doutais un peu – j’ai manqué l’autobus. Assise au bar du terminus (à quand ça au Québec svp?), je souris en me disant que certaines histoires sont d’autant plus parfaites lorsqu’entourées d’une aura d’illusions.
Une fantaisie inachevée entre deux étrangers dont les routes se sont croisées par hasard. Instant d’éternité, complicité momentanée non consommée, tellement le fun à se remémorer – et à raconter!

Très beau texte Val 🙂